La banque mobile : des perspectives immenses dans les pays émergents

La banque mobile : des perspectives immenses dans les pays émergents

De Nubank au Brésil à Banxy de Natixis en Algérie en passant par Orange Bank en Afrique de l'Ouest, la banque mobile trouve des marchés porteurs. Facilitant la gestion de l'argent au quotidien, le m-banking est également un outil au service de l'inclusion bancaire.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 12 Juin 2018

La banque mobile : des perspectives immenses dans les pays émergents

Au Brésil, l’usage du mobile est omniprésent

Selon les données compilées dans le rapport « Digital in 2017 - Global overview », publié par We Are Social et Hootsuite, le Brésil compte 237,7 millions de lignes mobiles actives, soit un taux de pénétration de 113 %. Il est donc logique de s’intéresser au déploiement du mobile banking dans un pays où les applications mobiles sont particulièrement soignées et utilisées. D’après l’étude menée par la Fédération brésilienne des banques (FEBRABAN), le Brésil a enregistré 25,6 milliards d’opérations par mobile en 2017 (+85 % en un an). Le nombre d’ouverture de compte bancaire via le mobile a triplé en 2017 par rapport à 2016 (1,6 million d’ouvertures de compte). Les plus grands utilisateurs, qui représentent 36 % des comptes, réalisent 80 % de leurs opérations bancaires par le canal du m-banking.

Le mobile banking prend même le pas sur l’internet banking. Les Brésiliens, parmi les plus accrocs aux réseaux sociaux, sont des usagers particulièrement actifs sur leur smartphone. Les banques saisissent l’opportunité en leur proposant toujours plus de services bancaires et de fonctionnalités afin d’améliorer leur expérience utilisateur. Ouverture de compte dématérialisée, paiement de pair-à-pair, possibilité de régler une facture en scannant le code barre via son smartphone : le secteur bancaire entretient la dynamique. En termes de paiement mobile, les Brésiliens clients de la banque Itaú Unibanco peuvent désormais utiliser en exclusivité durant 3 mois Apple Pay, sachant que les solutions Google Pay et Samsung Pay sont déjà disponibles.

Nubank, la néobanque brésilienne devenue licorne

La transformation numérique au Brésil est symbolisée par les trois licornes : 99 Taxi, Pap Seguro (solution de paiement en ligne) et Nubank (banque digitale). Lancée en 2014, cette dernière a conquis 3 millions de clients actifs. Elle a même recensé 14 millions de demandes de souscription à sa carte de crédit, dans un secteur bancaire auriverde très concentré. Basée à Sao Paulo, Nubank commercialisera prochainement un compte courant en ligne dans une nouvelle offre dénommée NuConta. La néobanque peut compter sur une nouvelle levée de fonds de 150 millions de dollars notamment alimentée par la société de capital risque DST Global Investment Partners.

Dans un si vaste pays où les inégalités sont énormes, certaines Fintech viennent en aide aux populations débancarisées à l’image de Banco Maré, une solution numérique de microfinance solidaire. Son fonctionnement est simple : le commerçant renseigne la valeur de l’achat générant un code QR dans l’application. Le client scanne le code avec son smartphone pour valider le paiement. Déjà 20 000 utilisateurs ont opté pour Banco Maré qui a traité plus de 2 millions de réals brésiliens. Avec des taux de pénétration toujours plus importants dans les pays en développement, le mobile banking est une opportunité dans le quotidien de nombreuses personnes non bancarisées, notamment en Afrique.

Natixis lance sa banque en ligne en Algérie

Avec un taux de pénétration de 119 % et 49,7 millions de lignes actives ouvertes (rapport « Digital in 2017 - Global overview »), l’Algérie est un terrain de jeu qui attire forcément les banques mobiles. C’est le cas de Natixis, filiale du groupe Banque Populaire Caisse d’Epargne, qui commercialise depuis avril dernier sa banque en ligne baptisée Banxy. Gratuite et accessible depuis Android et iOS, Banxy « utilise une technologie de pointe de vidéo-identification et des algorithmes de calcul pour garantir la sécurité de ses clients ainsi que leurs données ». Les fonctionnalités s’appuient sur celles de Fidor, la néobanque allemande rachetée par BPCE non encore lancée en France : virements instantanés interbancaires ou sur numéro de téléphone, consultation des soldes du compte bancaire en temps réel, livraison de chéquier, modifications des plafonds et blocage de la carte bancaire, etc.

Selon les propos recueillis par La Tribune, Julien Jolivet, le directeur de l'exploitation « retail » Natixis Algérie explique la stratégie : « Notre cible, ce sont les jeunes urbains connectés, les Millenials, très demandeurs de ce type de solutions qu'ils connaissent par les médias français. Nous espérons aussi que cette innovation s'étende par effet de contagion à notre clientèle naturelle d'entreprises pour leurs enfants, leur entourage. ». Et Boris Joseph, Directeur Général de Natixis Algérie de préciser : « Nous avons choisi l’Algérie comme première mondiale car les conditions s’y prêtaient notamment la consommation élevée des services digitaux. Avec cette nouvelle offre, Natixis Algérie souhaite progressivement couvrir toute l’offre bancaire traditionnelle. ».

Le mobile banking au service de l’inclusion bancaire

Le lancement de Banxy entre en résonnance avec la volonté affichée par le gouverneur de la Banque d’Algérie d’inciter les banques nationales à œuvrer en faveur d’une progression du taux de bancarisation (33 % hors compte postal) et de l’inclusion bancaire. En Afrique, le succès de la banque mobile participe justement à la lutte contre l’exclusion bancaire. La démocratisation des smartphones (le cabinet Deloitte évalue à 500 millions le nombre d’Africains équipés d’un smartphone ayant accès à internet en 2020 !) est un outil qui donne des résultats comme l’illustre la diffusion de la solution de paiement M-Pesa depuis son berceau au Kenya. Idem dans l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), zone dans laquelle Orange a sollicité une licence bancaire afin de pouvoir lancer Orange Bank d’ici la fin de l’année 2018.

Dans les 8 pays de la zone UEMOA, les opérations de mobile banking ont généré 17,3 milliards d’euros de transaction à la fin de l’année 2016, soit 20 % du PIB régional (+ 35 % en un an). Ce territoire d’Afrique de l’Ouest enregistrait 33 projets de banque mobile contre 11 seulement six ans plus tôt. Ces initiatives découlent de partenariats tissés avec des filiales bancaires régionales de grands établissements comme BNP Paribas ou Société Générale et des opérateurs de téléphonie mobile. Les trois quarts du marché sont préemptés pour l’heure par trois offres commerciales : Orange money, MTN money et Moov Flooz. Le nombre de souscripteurs a triplé depuis 2010, passant de 11 à 36,5 millions de personnes, avec un nombre de comptes actifs bondissant de 9,9 à 12,6 millions. Ces scores sont notamment dus à l’extension rapide du réseau de distribution, avec en prime une consolidation sans précédent de l’inclusion financière. Alors que le taux moyen de bancarisation est de 14 %, celui de l’utilisation des services financiers par téléphone mobile atteint 65 % en 2016.

Ce sont essentiellement des services bancaires de base comme les opérations de retrait et de dépôts d’espèces sur un e-wallet, les paiements de facture ou bien les transferts d’argent. Et les Fintech continentales « sont en train de construire des services financiers de plus en plus sophistiqués » autour du mobile, allant jusqu’aux produits « d’épargne, de crédit ou d’assistance » dixit Tidjane Deme de Partech Africa (filiale de Partech Ventures). C’est le cas de la start-up sénégalaise InTouch qui distribue un outil agrégeant les services de paiement mobile du marché. Financé à hauteur de 3,7 millions d’euros par Total et la solution de paiements électroniques WorldWide, InTouch permet ainsi aux commerçants d’être payés plus facilement.

Le mobile banking dans les pays émergents surfe sur trois vagues : l’essor des technologies de la communication et de l’information, une démographie faisant la part belle aux Millennials, et une progression continue du niveau de couverture du réseau. Les opérateurs téléphoniques, les Fintechs et les banques traditionnelles ne s’y trompent pas, d’autant que ces acteurs sont souvent bien vus des pouvoirs publics puisqu’ils permettent de favoriser l’inclusion bancaire, donc de soutenir le développement économique.



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