La bulle FinTech existe-t-elle ?

La bulle FinTech existe-t-elle ?

Eternel débat que l'existence d'une bulle spéculative autour des Fintech. Certains alertent sur le mirage des impressionnantes valorisations de ces acteurs de l'innovation financière, quand d'autres dénoncent un argument anti-Fintech stratégique. Et en chiffres ? Les levées de fonds battent des records en 2018.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 24 Juillet 2018

la bulle fintech existe elle

Fintech : quel scénario à l’avenir ?

Depuis plusieurs années, les experts du secteur bancaire s’interrogent sur le devenir des Fintech, ces sociétés qui développent et appliquent des technologies innovantes pour pénétrer et améliorer l’offre de produits et de services financiers. Pour certains, l’explosion des levées de fonds et l’émergence des premières licornes laissaient planer l’ombre portée d’une bulle spéculative. En 2016, les adeptes opposés à cette théorie légitimaient cette accélération des financements des Fintechs en avançant deux arguments : les opportunités pour ces services financiers innovants qui répondaient aux nouvelles attentes des clients et le positionnement sur un marché BtoC, puis ensuite sur le marché BtoB.

A l’époque, les doutes émis sur la viabilité des Fintech s’expliquaient aussi par le manque de recul. Toutefois, la taille incroyable du marché offrait des perspectives plutôt alléchantes. Dans une tribune parue en 2017, Sébastien Cromback, alors responsable du développement de GoCardless en France, rejetait l’idée d’une bulle spéculative des Fintech « qui n’existe pas », fustigeant au passage « cet argument favori de ses détracteurs ». Pour lui, ni les facteurs internes ni les facteurs externes au marché ne valident l’hypothèse d’une bulle, les capitaux-risqueurs, principaux investisseurs dans la Fintech, étant « devenus garants d’une forme de sélection naturelle » empêchant le retour d’un « épisode douloureux ».

Fintech en 2018, un premier semestre en plein boom

Le dernier baromètre de KPMG relatif au premier trimestre 2018 indiquait une baisse mondiale des investissements dans les Fintech (3,2 milliards de dollars, -23 %). Les sommes placées par les fonds du capital-risque retrouvaient les niveaux de 2013 et 2014, loin derrière le pic de 2015. Etait-ce un signe d’un dégonflement de la bulle Fintech ? Non, car les chiffres du second trimestre contredisent ce constat conjoncturel. Déjà, l’indien Paytm avait opéré une méga-levée de fonds de 1,4 milliard de dollars auprès du japonais SoftBank, alors que l’Europe voyait se révéler iZettle (175 millions de dollars), Atom Bank (103,6 millions) et Funding Circle (101 millions).

Selon l’étude CB Insights parue en juillet, le deuxième trimestre 2018 bat des records au niveau international : 20,34 milliards de dollars pour 383 opérations. Si les moteurs se trouvent en Asie et aux Etats-Unis, l’Europe a levé 852 millions de dollars enregistrant une nouvelle licorne : la néobanque Revolut. Au total, la Fintech mondiale réunit 29 licornes pour une valorisation de 84,4 milliards de dollars. En France, la levée de fonds la plus importante est à mettre à l’actif de la Fintech Ledger (61 millions d’euros en janvier), qui propose un coffre numérique sécurisé pour les portefeuilles de cryptomonnaie. Suivent Lendix (crowdlending) avec 32 millions d’euros en juin, Alan (assurance santé digitalisée) avec 23 millions d’euros en avril, Lydia (application de paiement) avec 13 millions d’euros en février et Lunchr (tickets restaurant dématérialisés) avec 11 millions d’euros en mai. Alain Clot, président de France Fintech, se félicite que la Fintech soit « le premier secteur de levée, devant l’Adtech » depuis l’an dernier en France comme dans le monde.

Comment le système bancaire traditionnel perçoit-il les Fintechs ?

Quel regard porte les banques traditionnelles sur la Fintech ? Le cabinet KPMG a planché sur la question, relevant dans son étude intitulée « Défi pour la transparence. Une banque robuste qui affine ses choix stratégiques. » que « si le Crédit Agricole ne mentionne pas les fintech dans une cartographie des risques et opportunités du marché, la banque française les intègre dans son rapport dans la partie dévolue à la politique RSE ». Chez BNP Paribas, on reconnaît l’existence des Fintechs en tant que concurrents, mais la banque du la rue d’Antin tient à mettre en avant ses partenariats et ses acquisitions comme la néobanque Nickel. Le rapport KPMG relève d'ailleurs que « BNP Paribas, Société Générale, BPCE à travers Natixis et Barclays ont par exemple pris une participation aux côtés d’une quinzaine d’établissements au sein de la Fintech Symphony, dans l’objectif de sécuriser l’accès à une technologie innovante. ».

Dans ses conclusions, KPMG note que les banques traditionnelles se préoccupent désormais plus des Fintech, ce qui se traduit dans leur communication. Elles actent « la voie à de multiples combinaisons possibles en matière de coopération et/ou compétition. (…) opérations de croissance externe, développements internes, partenariats, investissements en capital ». Si les banques et les Fintech sont en coopétition, c’est surtout le dynamisme du secteur qui entretient la problématique d’une éventuelle bulle spéculative. Parmi les probantes illustrations ce mois-ci, la récente levée de fonds de la plateforme de paiement Lemon Way (10 millions d’euros) ou la constitution de BlackFin Capital Partners, un des fameux « garants d’une forme de sélection naturelle ». Ce fonds d’investissement dédié aux Fintech et doté de 150 millions d’euros, comprend notamment la participation d’institutionnels comme BNP Paribas et plusieurs entités des groupes Banque Populaire, Caisse d'Epargne et Crédit Agricole, .



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